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roman d'apprentissage - Page 3

  • La Coloc de Jean-Philippe Blondel

    La Coloc

    de

    Jean-Philippe Blondel

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    "Give me a second/I need to get my story straight. C'est le début de la chanson We are young de Fun, qui me tourne dans la tête depuis un bon moment-et c'est exactement ce que je dois faire. Remettre de l'ordre dans mes idées, dans mon récit. C'est ce dont j'ai besoin, après l'année qui vient de s'écouler. Il s'est passé tellement de choses-je ne sais pas par quel bout dérouler la pelote. Quand je regarde ma vie, en ce début juillet, et ce qu'elle était il y a un an, je n'en reviens pas. J'ai accompli ma révolution. Pourtant, comme toutes les révolutions astrales, je me retrouve un an après à mon point de départ. Mais je sais que ce n'est que temporaire, que le voyage va reprendre, et vous savez quoi? J'ai hâte."

    Romain Seurat, seize ans, revient sur son année de 1ère L.

    Jusqu'à son entrée dans cette classe, il avait vécu dans un petit village loin de tout avec ses parents. Après avoir abandonné la solution de l'internat au milieu de l'année de seconde, il se levait très tôt et prenait le bus pour se rendre dans le lycée de la ville.

    Mais, voilà, sa grand-mère est morte en mai...Et elle a laissé en plein centre un appartement de cinq pièces.

    L'idée de Romain: s'y installer tout seul et trouver des colocataires.

    Une idée qui, malgré l'opposition de sa mère, fait progressivement son chemin...

    Et, très vite, notre héros se retrouve installé avec deux garçons de son âge. Deux personnalités complètement opposées a priori: d'un côté, le geek au look improbable, de l'autre, l'adolescent populaire, celui que tous veulent comme ami ou amoureux.

    Mais, justement, cette année, Romain va oublier tous ses a priori....Et faire quelques rencontres décisives.

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    Jean-Philippe Blondel appartient à ces auteurs dont j'aime retrouver régulièrement la petite musique. Et là, une fois encore, je me suis laissée happer par son style si vivant et si sensible.

    "J'avais lu ce terme dans un bouquin qui traînait sur le canapé quelques jours plus tôt. Un roman d'un écrivain américain, Kerouac, dont je n'avais jamais entendu parler [...]Je l'avais ouvert au hasard. Il y était question des moments de grâce dans l'existence. De ces instants où, soudain, tout s'illumine en soi et autour de soi-parce qu'on trouve une cohérence, parce qu'on comprend son rôle dans l'univers. Un satori, ça s'appelle, apparemment."

    De satori, il en est question dans ce roman d'apprentissage, dans cette éclosion d'un jeune adolescent.

    Quand on fait sa connaissance dans les premières pages, Romain ne se démarque pas de ses congénères. Comme eux, il aspire à être populaire, reconnu. Comme eux, il assiste impassible aux moqueries dirigées contre ceux qui sortent un peu de la norme. Comme eux, il aimerait avoir une copine.

    Mais cette coloc qu'il propose et qui, après moult débat enflammés, remporte l'adhésion de ses parents, va changer son regard et lui permettre de s'accepter comme il est.

    De la confiance, il va en gagner. Mais après quelque satori, quelques déceptions aussi, quelques remises en question...

    Car cette année-révolution ne va pas être un long fleuve tranquille..

    On s'attache à ce narrateur qui, forcément, nous rappelle nos 16 ans. Et on suit avec beaucoup d'intérêt sa 1ère L.

    Malgré ses qualités indéniables, je dois cependant souligner quelques défauts de cet ouvrage.

    A commencer par le couple formé par les parents de Romain. En 145 pages, il y avait déjà tellement de thèmes à brasser autour de cette évolution que je me demande s'il était adéquat de développer en parallèle le sujet des désillusions conjugales. Même si le héros ouvre les yeux sur plein de choses, cela fait peut-être un peu trop...Ou alors, j'aurais préféré quelques chapitres en plus pour développer ce ressort d'intrigue.

    De même, je n'ai pas été convaincue par les paragraphes finaux. J'aurais souhaité que le livre se clôture sur "Il y a un an, j'étais un rêveur. Aujourd'hui, je suis réalisateur. Et scénariste aussi". Une belle conclusion à ce récit de douze mois décisifs. Les ajouts ouvrent, au contraire, des perspectives (peut-être pour une suite?) et j'apprécie quand les choses ne restent pas en suspens.

    Bref, vous l'aurez compris: en dépit de ces quelques bémols, La Coloc reste un roman qui se dévore et où on retrouve avec joie les mots à part de Jean-Philippe Blondel.

    Actes Sud, 2015, 145 pages

     

     

  • Papa-Longues-Jambes

    Papa-Longues-Jambes

    de

    Jean Webster

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    "Le premier mercredi du mois était un jour parfaitement abominable qu'on attendait dans l'horreur, qu'on supportait avec courage et qu'on se hâtait d'oublier."

    Tous les premiers mercredis du mois, les 97 orphelins sont inspectés par les bienfaiteurs de leur institution. Cette journée se révèle particulièrement éprouvante, notamment pour l'aînée d'entre eux, une certaine Jerusha Abbott qui doit veiller à leur tenue, à leur maintien et à leur comportement.

    Aussi, quand elle est appelée dans le bureau de la directrice, elle craint une remontrance. Mais elle découvre qu'un des riches membres du comité de l'institution, confiant dans son talent et dans sa future carrière d'écrivain, a décidé de l'envoyer à l'université et de pourvoir à ses besoins le temps de ses études. La seule condition: qu'elle lui adresse, tous les mois, une lettre pour lui parler de ses occupations et de l'avancée de ses progrès.

    Débute alors un échange épistolaire à sens unique entre la pétillante Judy Abbott (elle s'est rebaptisée ainsi) et ce donateur inconnu qu'elle a surnommé Papa-longues-jambes.

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    J'avais beaucoup entendu parler de ce roman vintage américain, notamment sur le très bon forum Whoopsy Daisy. Je me suis lancée vendredi dernier et je l'ai très rapidement terminé.

    Jerusha Abbott est une jeune fille de dix-sept, particulièrement brillante et dotée d'un grand sens d'humour. C'est d'ailleurs grâce à ce trait de caractère et à un texte moqueur sur l'institution qui l'abrite qu'elle doit d'être remarquée par un mystérieux bienfaiteur (elle ne le voit que de dos et est frappée par la longueur de ses jambes). Par certains moments, cette héroïne piquante m'a fait penser à la Jo des Quatre filles du Docteur March de Louisa May Alcott.

    Grâce à cet homme, elle part à l'université. Au fil de ses lettres et des esquisses qu'elle ajoute, nous découvrons donc le quotidien des étudiantes américaines en ce début de vingtième siècle.

    Les missives, même si elles n'obtiennent jamais de réponses, se font de plus en plus longues et obéissent à un rythme de plus en plus soutenu. De l'entrée "Cher Gentil-bienfaiteur-qui-envoyez-les-orphelins-à-l'université", on passe au "Cher Papa-longues-jambes" et même au "Cher papa".

    Et cela se ressent dans le ton des lettres qui, mois après mois, oscille de plus en plus entre l'humour et une certaine forme de tendresse.

    "Depuis que j'ai appris à lire, j'ai inventé un bien joli jeu; je m'endors chaque soir en me persuadant que je suis l'héroïne (ou du moins le personnage le plus important) du livre que je suis en train de lire.

    A présent, je suis Ophélie-ô une Ophélie pleine de bon sens! Je passe mon temps à distraire Hamlet. Je le câline, je le gronde, je veille à ce qu'il mette son écharpe dès qu'il fait froid. Je l'ai complètement guéri de sa mélancolie. Le roi et la reine sont morts tous les deux dans un naufrage en mer-ce qui nous a dispensé des funérailles. Maintenant Hamlet et moi régnons en maître sur le royaume du Danemark. Nous nous en sortons magnifiquement."

    Les cours, les examens, les sessions de basket, les thés, les sorties entre amies, les soirées entre colocs constituent autant de sujets développés. Puis, l'amour apparaît progressivement , en la personne d'un frère d'une de ses amies et de l'oncle fortuné d'une autre.

    En effet, Judy fait son apprentissage de la vie. Elle découvre pêle-mêle le plaisir livresque, le fonctionnement d'une ferme, la fascinante et bruyante New York, la complicité avec d'autres jeunes filles de son âge, la joie de plaire, l'intimité qui peut exister avec le sexe opposé, les premiers flirts, les incertitudes sentimentales..

    Très vite, on comprend l'identité de ce fameux Papa-longues-jambes mais ce suspense, rapidement dissipé, ne nous fait pas bouder notre plaisir. Car on passe un bon moment en compagnie de ce roman épistolaire un peu désuet certes, mais dont il se dégage encore un certain charme.

    Bref, vous l'aurez compris: même si je n'ai pas partagé l'enthousiasme de certaines, j'ai trouvé cette lecture agréable. Et je tenterai de regarder prochainement la comédie musicale avec Fred Astaire et Leslie Caron.

    Gallimard Jeunesse, 2007, 212 pages

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  • Chrysis de Jim Fergus

    Chrysis

    de

    Jim Fergus

     

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    "Au printemps 1916, Bogart Lambert dit "Bogey", un jeune homme de 17 ans, quitte le ranch familial dans le nord du Colorado sur un hongre gris pommelé qui portait le nom de Crazy Horse; il s'en allait en France rejoindre les rangs de la Légion étrangère pour combattre les Huns, les ennemis de la Grande Guerre."

    Chrysis, le quatrième roman de Jim Fergus, s'attache au destin de deux héros d'exception: d'un côté, Bogart Lambert et de l'autre, Chrysis Jungbluth.

    On les rencontre tous les deux à l'âge de dix-sept ans.

    En 1916, Bogart Lambert est un jeune garçon persuadé qu'il est de son devoir d'aller combattre les Huns en hommage à ses ancêtres français. Il quitte donc son Colorado natal sur son cheval Crazy Horse. Et le voilà embarqué pour un long périple aux Etats-Unis. Un périple qui va l'emmener de l'autre côté de l'Océan dans les rangs de la Légion étrangère et lui conférer le rôle de courrier.

    En 1925, Gabrielle Jungbluth est une jeune femme passionnée de peinture qui vient d'entrer en première année de la seule école consacrée à cet art et ouverte au sexe féminin. Elle apprend ainsi les différentes techniques. Mais son fort caractère et son esprit de résistance lui font immédiatement remettre en cause l'enseignement trop académique et trop "pudique" de Jacques Ferdinand Humbert, un octogénaire qui a formé certains Grands comme Braque.

    Nous suivons donc ces protagonistes dans leurs années charnières, celles où on quitte l'adolescence pour entrer pleinement dans l'âge adulte. Celles de toutes les découvertes et de toutes les premières fois. Celles de l'éclosion et de la confirmation des talents. Celles des premières décisions.

     

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    J'avais remarqué ce roman sur le blog de ma copinaute Céline. Mais, même si je l'avais noté et que le sujet m'intéressait beaucoup, je n'avais pas cherché à me le procurer. Et, la semaine dernière, j'ai été attirée par le titre et la couverture en farfouillant sur les rayonnages de ma médiathèque. Je l'ai ouvert ce matin et immédiatement dévoré.

    Il s'agit de mon premier ouvrage de Jim Fergus. Et sans doute pas le dernier.

    Celui-ci revêt une connotation particulière pour lui. Il s'est inspiré du tableau acheté pour sa compagne lors de la dernière année de sa vie. Un tableau qu'ils avaient remarqué ensemble dans une boutique de Nice lors de leur dernier voyage tous les deux en Europe et qu'il lui avait offert à leur dernier Noël ensemble.

    "C'est à la fois la joie et la douleur de cette vie d'écriture: réveiller nos fantômes pour les amener sur ces pages où ils survivront à jamais"

     

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    Cette oeuvre s'intitule Orgie et a été réalisée par une jeune artiste de dix-huit ans: Gabrielle "Chrysis"Jungbluth. Par conséquent, Jim Fergus est parti sur ses traces. De son lieu de naissance à son lieu de mort, il a tout arpenté et a choisi de nous narrer l'existence de cette femme de façon romancée.

    Malgré le titre, quand on ouvre les premières pages, ce n'est pas Chrysis qui se présente à nous. Mais Bogey, de son vrai nom Bogart Lambert. Un jeune cow-boy expert en boxe et en maniement des armes qui a quitté son Colorado natal pour combattre les Huns. Le second héros de ce livre.

    On suit son apprentissage de son départ de la maison natale à son arrivée à New York, de sa vie dans un bordel là-bas à son arrivée dans l'armée.

    Engagé dans la Légion étrangère, il parvient à garder son cheval et devient "le courrier cow-boy". Celui qui livre les messages en dépit du danger et sous les rafales de balles de l'ennemi.

    Mais le 11 novembre, son destin le guette près de Mons. Marqué par l'explosion d'un obus et par les blessures qui en découlent, Bogey tente de se reconstruire en Ecosse, puis à Paris.

    A cette époque, dans les années 1925-1929, la capitale, et tout particulièrement son quartier de Montparnasse, constitue un lieu d'effervescence culturel. A chaque coin de rue et dans chaque café, il n'est pas rare de croiser quelqu'un qui prétend écrire, dessiner, peindre...Et ce qui prime dans ce Paris de l'après-guerre, c'est le sens de la fête, l'envie de croquer la vie à pleine dents et de se débarrasser de tous les carcans d'autrefois.

    Malgré ses origines bourgeoises et l'éducation très stricte qu'elle a reçue, Gabrielle est très attirée par ce quartier de Montparnasse, son vivier artistique et son atmosphère bohème et profondément libre. Mais il va falloir du temps à notre héroïne, qui se rebaptise Chrysis après la lecture d'un roman sulfureux, pour pouvoir entrer dans ce monde et en faire partie.

    Autant d'étapes auxquelles nous assistons. Gabrielle sort peu à peu de sa chrysalide et devient cette jeune artiste enthousiaste, pleine de vie et d'espoir, sensuelle, libérée dont elle n'osait rêver adolescente. Cependant, cette transformation ne se fait pas sans heurts. On a du mal encore à cette époque à accepter qu'une femme devienne artiste et qu'elle mène son existence comme bon lui semble.

    Au fil de son évolution, Chrysis croise de nombreuses personnalités de ce Montparnasse de l'époque et fréquente des lieux réputés.

    Et sur son chemin, comme vous vous en doutez, elle va également faire la rencontre de Bosey...

    J'ai bien aimé la construction de cet ouvrage, fondée sur l'alternance de points de vue narratifs entre Bosey et Chrysis. De plus, le choix de ces deux héros m'a semblé tout à fait pertinent. Malgré les six ans qui les séparent, Bosey et Chrysis n'ont pas la même attitude face à la vie. A la solitude et au douloureux passé de l'un répondent l'insouciance et la gaieté de l'autre. Tout simplement car l'un a vécu la conflit sur le front, et l'autre l'a connu enfant à l'arrière...

    A cette réflexion sur la Première Guerre mondiale et ses conséquences sur la vie des soldats s'ajoute une autre sur l'art, la condition d'artiste et la difficulté de s'affirmer en tant que femme dans ce milieu dans les années 20.

    Deux thèmes forts de ce roman qui m'ont vivement intéressée. Tout comme, vous vous en doutez, la peinture de ce Paris des années folles, l'effervescence de Montparnasse...

    Bref, vous l'aurez compris: j'ai passé un très bon moment en compagnie de ce roman sur l'éveil, l'amour, l'apprentissage, la liberté, l'art, la guerre et les années Folles.

    Editions du Cherche-Midi, 279 pages, 2013